CROIS(E)-MOI

Crois(e)-moi

J’avais rendez-vous avec elle au coin de la rue. 

Je savais sa mauvaise habitude du retard, je ne me pressais donc pas.

Elle était pourtant déjà là.

Je n’eus pas de mal à la reconnaître.

Ce regard si lointain qui n’appartenait qu’à elle.

Je lui trouvai de l’embonpoint et une fatigue camouflée sous quelques rides à peine creusées.

Elle avait vieilli mais ne savait toujours pas l’âge qu’elle avait, elle devait calculer. Ce n’était pas quelque chose d’inné pour cette affamée des mots et des livres.


On partagea un café et son amertume nous réconforta toutes les deux.

On échangea sur le goût de la vie, son coût aussi.

Elle se laissa aller à des confidences et à ce qui l’avait appauvrie

Les amis partis, l’argent et les soucis. 

Elle ne pleura pas mais sa bouche dessinait la tristesse d’un monde qu’elle ne reconnaissait plus, rivé à son égoïsme et à sa fausse courtoisie.

Elle avalait difficilement les dernières années de sa vie à nourrir l’intime et ne pas avoir réussi.

Du gaspi cette course à l’envie.


Elle ne savait pas à quel point elle était belle et ce qu’elle dégageait 

Elle était pareille mais, à un point près, très loin de celle que j’avais côtoyée.

Elle savait désormais

Qui elle était et ce qu’elle voulait.

Nous avons échangé nos numéros, sur les prénoms de nos enfants et leurs manies. 

Elle a refusé une cigarette, avaler les nuages gris c’était trop pour elle 

Déjà qu’elle leur avait permis de prendre un morceau de son ciel et de ses nuits.

Nous nous sommes touché les mains comme lorsque nous étions intimes.

La sienne était chaude de tous les rêves qu’elle contenait et préservait.

J’ai su qu’elle n’en dirait pas plus

Elle prétexta son bus.


Elle m’a plantée là, 

Un papier au creux des doigts en guise d’au-revoir. 

« Crois-moi le temps passe et ne se rattrape pas.

Crois(e)-moi si tu le veux. »

Ton âme (ta) sœur



En réalité, ça ne s’est pas passé comme cela. 

Je n’ai tout simplement pas osé aller à la rencontre

De moi.

J’ai tourné dans l’appartement et griffonné cette page 5 fois. Les rendez-vous avec ce que nous serons demain peuvent-ils réellement s’écrire à l’avance ? J’ai préféré me montrer prudente.  Mieux vaut ne pas se brouiller avec le destin.


FEVRIER

Février. Tout (te) pousse.

Février, 

À la base,  ce n’est pas vraiment mon préféré.

Un résidu de fatigue ou de stress certainement

Des résolutions du début d’année à a(e)ncrer ou déjà condamnées.

Un mois pour tester la capacité à résister.

Dans le cycle naturel, Février coïncide avec le réveil timide de la Terre et le retour de la tendresse par les percées de luminosité.

Je sais bien qu’à s’y pencher, ce mois est fait pour

Régénérer

Germer.

 

 

Pour contrer mes premiers ressentis je fais de Février un moment où je choie mon intimité. M’occuper en conscience de moi et de mon habitat permet aux nouveaux projets de trouver un espace fertile et de me délester de l’inutile et du (dé)passé comme des lambeaux de peau muée. Notre intérieur est un formidable outil de révélation de soi, voire de transformation.  Il n’est qu’une extension de nous, et prendre soin de l’un ne peut qu’agir sur l’autre.

 

 

Habiter = nos habitudes, notre façon d’être au monde dans cet espace intime du foyer. La maison est le lieu privilégié pour être soi-même, s’inventer, créer un espace qui accueillera nos personnalités. De quoi nous entourons-nous ? Quelle énergie est portée par les objets qui composent notre quotidien ? La Lune Editions

 

 

Je me reconnecte particulièrement en ce moment à la magie des plantes et des éléments aussi. Elle est naturellement protectrice et inscrite en nous. Planter un laurier devant la devanture de sa boutique, un romarin au pied de la grille du jardin, placer une plante grasse à l’entrée de l’habitation, tresser une couronne pour la porte principale, faire brûler de l’encens ou des écorces, prendre des bains de gros sel, … ces gestes font partie de nos traditions intuitives. Je vous livre mes pratiques simplissimes (glanées au fil de mes lectures et rencontres) pour me chouchouter et harmoniser mon foyer, peut-être nourriront-elles les vôtres !

 

 

– La bougie : Je profite des matins encore chagrins, ceux dont la lumière hésite entre la nuit noire et le saut du lit, pour allumer une bougie. Prendre son café à la lueur d’une simple flamme suffit à calmer les idées et à apaiser l’angoisse de l’horaire agité. J’associe ce tout petit geste à la pensée d’un proche ou à une intention, une dédicace matinale en soi.

 

 

– Le bol : Le silence engendré par la reprise du début d’année m’incite à prendre soin de moi dès le réveil et à métamorphoser le moment du petit déjeuner. En suivant les conseils de Lili Barbery et d’Alice Roca, j’ai pris conscience que cette parenthèse du début de journée est le rendez-vous avec moi-même que je dois réellement préserver. Temps perdu ou gagné, lorsque vous faites l’expérience de vous surprendre dès le réveil, la réponse s’impose à vous comme une évidence. Dixit les diktats et les leçons « anti » (gluten, lactose, sucre, jus de fruits, etc), j’écoute mes besoins et m’impose la créativité dans la découverte de super aliments, graines, laits végétaux et préparations (à la minute si possible) mais aussi dans l’esthétisme. Le petit déjeuner a nettement plus de saveur dressé dans un bol ou dans une assiette qu’on ne laisse pas trainer au fond de l’armoire de peur de l’abîmer. Je mange avec les yeux, se faire plaisir passe aussi par la recherche du contenant qui ravit.

La tasse primavera en grès émaillé
Le bol primavera en grès émaillé

J’ai testé dernièrement ces recettes tirées du livre “Pimp my breakfast”. Elles ont l’avantage d’être sans gluten et transformables.

 

 

1 : Mixez une banane avec du yaourt de brebis nature bio (ou une alternative soja) et 2 cuillères à café de thé matcha. Versez dans un bol et parsemez de myrtilles, éclats de noix de coco, chocolat noir et graines de sarrasin grillées. Une version aux mêmes vertus anti-oxydantes et toniques : deux bananes réduites en purée et mélangées à 2 cuillères à soupe d’açaï en poudre, à  présenter avec des noix de cajou et des super aliments (graines de chia, mûres, chanvre, etc.).

 

 

2 : Si comme moi vous appréciez les pains denses et riches en graines, mélangez dans un grand bol les éléments secs suivants : ½ tasse de graines de tournesol, ½ tasse de graines de courge, ½ tasse de chanvre, ½ tasse d’amandes concassées, ½ tasse de flocons de sarrasin, 1 tasse de flocons d’avoine sans gluten, 2 cuillères à soupe de graines de chia, 3 cuillères à soupe de psyllium blond. Ajoutez 3 cuillères à soupe d’huile de coco et 1 tasse et ½ d’eau. Eventuellement, selon vos préférences, ajoutez un peu de sirop d’érable ou de la fleur de sel. Mélangez le tout à la main et laissez reposer la pâte 2 heures dans un moule à cake recouvert de papier sulfurisé. Enfournez dans un four préchauffé à 180°. Au bout de 20 minutes, retournez le pain pour une nouvelle étape de cuisson de 35 minutes. A déguster en version sucrée-salée  avec fromage de brebis, lamelles fines de concombre ou d’avocat et  myrtilles.

Le double chandelier
La rubrique "De lumière"
Le coussin de méditation

– L’olive : Ma parapharmacie tient en peu de produits. Une base de spiruline, une synergie d’agrumes, des huiles essentielles de lavande et de ravintsara, un complexe détox et rescue et puis la fleur de Bach « olive ». Cette dernière recharge mes batteries, et me sort de la léthargie qu’un trop plein de sensibilité vient souvent conforter. Elle aide, dit-on, à prendre de bonnes résolutions et pousse à agir ! Intuitivement cette fleur me ramène aussi à l’olivier sacré de notre maison au Portugal et à la force de ses racines. Le visualiser suffit pleinement à irradier la chaleur et la tranquillité.


– La sauge : Trier permet d’accueillir la clarté de l’espace mais aussi de l’esprit. Certains ne réalisent cette pratique qu’au printemps, pour ma part je désencombre régulièrement. Marie Kondo a dû passer par l’un de mes neurones un jour de pleine lune ou de méditation !

Le rapport que j’entretiens avec les objets relève de l’émotion et de l’adoption. Je bannis la surconsommation, les décorations produites en surabondance et dépersonnalisées. Cela permet déjà à une bonne partie des énergies non désirées de ne pas franchir la porte de la maison. Mon alliée la plus simple pour nettoyer et débarrasser ? La sauge, qui contiendrait des propriétés antibactériennes et dont la fumée nettoierait littéralement l’air. Enroulées sur le bâton de sauge ou dans le bol qui en accueille les cendres, j’ajoute toujours une feuille et l’autre d’eucalyptus. J’ai appris que le lien entretenu avec la plante, dans sa tradition et son origine, permet d’intensifier l’action de purification.

 

Note si vous n’appréciez pas particulièrement l’odeur de la fumigation :

 

Créer sa propre brume ou utiliser un spray aromachologique reproduit les mêmes intentions de purification. Sur LA LOJA, vous pouvez trouver la brume Calm, combinaison de sauge, bergamote et palo santo mais vous en réaliserez aisément en adaptant la recette suivante : dans un vaporisateur de 30 ml en verre versez quelques gouttes d’huile essentielle de sauge auxquelles vous pouvez ajouter d’autres huiles essentielles (par exemple la fraicheur de la menthe ou de la bergamote), remplissez au ¾ d’eau de source et au dernier quart d’hamamélis. 

Le geste “good vibes” : je n’hésite pas à vaporiser la brume Calm sur mon oreiller, sur une écharpe et sur mon tapis de yoga.  

La brume relaxante
La sauge

– Les herbes et les fleurs séchées : Je me sépare très rarement des fleurs que je peux faire sécher. J’en apprécie l’esthétique (ce doit être mon côté romantique non avoué). Je les utilise aussi dans mes colis ou sur mes emballages pour en prolonger le cycle. Depuis peu, je leur ai trouvé une place un brin plus magique. Je rassemble au creux d’un morceau de tissu les restes épars de mes bâtons de sauge, des herbes du jardin ou des fleurs séchées et quelques gouttes d’huiles essentielles, le tout broyé. Je finalise le pochon en y glissant une intention, un mot ou une pierre destinée à la personne à laquelle j’offre ce talisman ou à la pièce dans laquelle je le dépose. Cette astuce, je l’ai empruntée à Erika Feldmann. 


Ma liste herbacée secrète : le romarin pour favoriser l’énergie et l’abondance, le laurier pour stimuler l’intuition, l’origan pour encourager la paix, la lavande pour la tranquillité, le clou de girofle pour augmenter le taux vibratoire, les huiles essentielles d’eucalyptus ou de lavande pour nettoyer les énergies de conflit ou négatives, les peaux d’agrumes pour attirer la joie, les pétales de roses pour apporter harmonie et douceur.

Si comme moi vous avez conservé et séché vos pelures de mandarines ou de clémentines, voici ce que vous pouvez en faire aussi : une tisane avec des rondelles de gingembre frais après chaque repas pour favoriser la digestion (en médecine chinoise ces peaux séchées ou ChenPi contribuent à « débloquer ») ou une poudre qui remplace les zestes dans les pâtes à gâteaux ou dans les yaourts.


–  L’eau et l’air : Je confie mon ménage aux produits les plus sains possibles et en quantités raisonnées. Cela peut paraître incongru (surtout aux yeux des miens !) mais le dimanche est mon jour idéal pour faire place propre et nette. Je n’en n’avais pas conscience, mais celui-ci, jour du Soleil, combine la force et la lumière, le calme et l’ancrage, un équilibre parfait pour cet exercice.

Le premier geste, ouvrir les fenêtres. On ne saisit pas toujours la puissance de l’air dans nos maisons. A vivre dans des intérieurs surchauffés, les énergies peuvent stagner. La fenêtre, c’est l’outil le plus simple pour évacuer. 


J’utilise les préparations naturelles de Les Choses Simples mais je m’essaie aussi à la fabrication d’un produit maison (gouttes d’huiles essentielles de sapin, d’orange et de baies de genévrier, 85 g de savon noir et 30 ml de vodka conservatrice – à diluer dans un seau d’eau chaude).

Une astuce des pays du Sud : rincer le sol avec l’eau de cuisson tiédie de bâtons de cannelle permet d’ouvrir l’accès aux émotions et à l’harmonie.


Au moment des pleines lunes, je crée aussi mes eaux de pierres. L’eau de lune est protectrice, purifiante et énergisante, associée aux cristaux elle va renforcer les bienfaits de ceux-ci. Avant le printemps, j’opte pour le quartz rose et le cristal de roche pour impulser l’énergie de compassion, de confiance, d’intuition et d’amour nécessaire au renouveau. J’utilise cette eau ensuite pour recharger mon brumisateur d’huiles essentielles (en complément avec l’orange douce par exemple pour un complexe hyper bienveillant). Vous pouvez l’ajouter dans l’eau du bain ou dans l’eau qui nourrit les jeunes pousses et semis.


– Les plantes vertes : Quelque chose en elles nous demandent de ralentir et de prendre soin de ce qui nous entoure. Après les avoir un peu délaissées et pour les entretenir avant le retour des beaux jours, je les dépoussière (avec l’eau de lune par exemple), je retire les feuilles jaunes, je remue la terre racrapotée. La simplicité de ces gestes reconnecte à la patience et aux petits détails de la vie.

Pour les aider à lutter contre le manque de lumière, je dépose un mélange de marc de café et de sucre à leur pied avant l’arrosage.

C’est à cette époque aussi que j’enfouis dans leur pot les morceaux de cristaux cassés ou les perles des bracelets de pierres qui ont cédé d’avoir bien travaillé. Un rituel qui permet de « nourrir » les racines par un retour à la Terre et de donner un élan à mes intentions.

Sur LA LOJA, je vous propose quelques-uns de ces objets qui m’entourent et qui contribuent à (me) révéler : 

  • Les bougies à l’unité et les chandeliers 
  • Les bâtons de sauge 
  • L’encens du Portugal
  • Les bois de Palo Santo
  • Les produits naturels Les Choses Simples (savons mains et corps, vaisselle, etc) – en précommande
  • Les bougies et brume aromachologiques
  • Les sels de bains naturels (la petite astuce  “thé de bain” :  glissez dans un pochon en mousseline une poignée de sels de bain, attachez-le sous le robinet afin que l’eau chaude passe à travers. )
  • Les torchons et tabliers (une nouvelle gamme en gaze de coton légère est arrivée  !).
La bougie Des beaux jours
Les bois de Palo santo
Le savon naturel multi usages
Le savon douche et cheveux au tilleul
Les sels de bain naturels
Le bloc de savon à la figue

Il faut parfois peu de choses pour éveiller à la subtilité du quotidien. Une fragrance, un geste, une habitude, un objet. L’essentiel est de mettre de la conscience sur ce qui nous entoure. Et une bonne dose d’amour.

Le reste est magie que vous pouvez confier à Février !

 

Delphine

 

Le tablier serveur en gaze de coton éco
Les essuies en gaze de coton éco

Remarque : Cet article vous a plu ? N’hésitez pas à le commenter ! La vie est plus douce partagée ! 

Félicie

FéLICIE

Je rédige, protégée, à l’ombre d’un arbre familial. En sa sève coulent les prénoms et les vies de celles à qui je dois probablement tout ce que je suis. Des femmes au destin peu commun, éclaireuses ou guérisseuses.

Je vous ai déjà parlé de Suzanne à la tendresse et à la mémoire fluettes, de Francelina ma grand-mère à deux ailes, d’Anna l’arrière bien excentrique mais pas encore de Félicie. Voici les premières lignes de son récit qui m’ont été données par la nuit :

Il devait avoir 16 ans à peine et ce serait son dernier décembre. Elle le savait. Elle lui racontait de ses yeux l’immensité du voile neigeux sur la campagne. Elle taisait les uniformes ensanglantés, taches éparses bleues et rouges sur la poudreuse. Elle préférait lui décrire un champ de coquelicots aux cœurs noirs et le blanc immaculé qui immobilisait la colère des canons.

 

Les images l’aidaient à tenir, la poésie à soutenir l’atrocité des nuits sans bout et à supporter la fange mêlée aux cris.

Chaque jour, elle suturait les blessures profondes et extirpait le feu des éclats d’obus. Elle s’appliquait. Elle recousait les cœurs en y glissant dedans un petit bout du sien. Elle déposait son amour pour les autres sous la gaze désinfectée. On la voyait caresser de sa douceur les visages épuisés d’avoir lutté et couvrir de ses mots la chair frigorifiée. Dans ce qui servait d’antichambre à la folie, sa présence seule rassurait. Elle apaisait et tiédissait le souffle jusqu’à ce qu’il s’autorise à regagner le corps un peu moins meurtri. Elle assistait les heures sombres et empêchait la mort de croquer toute la vie. 

Ce soir pourtant, elle lui tiendrait la main sans relâcher l’étreinte. Elle le sentait, elle accompagnerait cette étoile éphémère vers la lumière.  

Félicie était infirmière. Mais la passeuse, on l’appelait. 

 

C’était à l ‘époque où la neige tombait du ciel et des toits. Noël se résumait à ce simple apparat. Sa foi. 

Félicie avait le don de soi, toute sa vie serait marquée par cela. 

 

La capsule de cette fin d’année est parsemée de bleu et de rouge. Sans fioriture ni ornement. La table des fêtes est celle qui rassemble et me ressemble. La nostalgie du vichy, l’authenticité des céramiques de Tom and Folks, la simplicité de la gaze de coton et la chaleur des bougies.  Félicie n’est pas loin et j’ai bien saisi dans les premiers flocons son appel à rentrer chez moi, à raviver l’amour et à recouvrir d’une nappe l’ombre de mes maux. Noël est là, pourquoi ne serais-je pas en joie ?

A l’encre

A l'encre

Elle aimait inventer des mots.

Elle buvar𝚍ait.

𝙴́𝚌𝚛𝚒𝚛𝚎 𝚒𝚗𝚝𝚎𝚖𝚙𝚎𝚜𝚝𝚒𝚟𝚎𝚖𝚎𝚗𝚝 𝚊̀ 𝚜𝚎 𝚗𝚘𝚢𝚎𝚛 𝚍𝚊𝚗𝚜 𝚕’𝚎𝚗𝚌𝚛𝚎 

Elle utilisait le stylo comme d’autres usaient de leur bouche.

Le fond de la classe était son repère, 

L’observation son plaisir inavoué et les taches sur les doigts sa honte maquillée. 

Elle bavassait en silence

Et ne savait pas qu’il s’agissait d’un don en réalité.

[…]

Elle ne finissait jamais ses phrases comme s’il fallait économiser les mots.

Cette manie en agaçait plus d’un qui ne vibrait pas au même tempo.

Elle butait sur les fins

Pour retenir un souffle, une idée

Un autre monde déjà et, de l’autre côté, 

Les autres hébétés.

Ses dialogues écourtés n’étaient que le calque d’une pensée agitée et réservée.

Hyper, sa sensibilité.

[…]

Elle détestait le bruit.

Seul le froissement du papier kraft lui était tolérance, rassurance et familiarité.

Elle nourrissait pour le trop plein de sons et la cacophonie ambiante presqu’une aversion.

Pourquoi fallait-il hausser et glousser

Pour toujours se réaliser ?

Les modestes et les en-retrait pouvaient la comprendre.

C’est du moins ce qu’elle espérait

A mots feutrés.

[…]

Elle hésitait 

Entre la joie et la monochromie. 

Contrôler les couleurs et fuir  les regards appuyés

Ne pas faire de bruit, taire les excès de folie

Pour elle, c’était facile.

Elle ne laissait personne imaginer tous ses états intimes 

Ni ouvrir son carnet de croquis.

Les autres, 

Plutôt qu’elle.

Elle préférait.

Un jour, 

Beaucoup plus tard, elle déciderait

Elle oserait,

Laisser sur elle couler l’encrier. 

[…]

 

“Buvard”, “Calque”, “Kraft” et “Couleurs”  sont les noms donnés aux émaux  de la collection Studio de Jars Céramistes. En édition limitée sur La Loja.Les

Canicule

canicule

LIGNES 

𝑅𝑎𝑚𝑒𝑛𝑒𝑧-𝑚𝑜𝑖 𝑎̀ 𝑙’𝑒́𝑡𝑒́ 𝑑𝑒 𝑚𝑒𝑠 𝑝𝑎𝑟𝑒𝑛𝑡𝑠.

Sur cette plage où nous passions nos journées à nous gaver d’iode et de crèmes glacées. Dans la cabane de tissu ligné. Sur les nattes de corde et dans la mer gelée.

Le mois de juillet avait l’odeur de l’huile de coco, du sel et des algues. Nous avions nos rituels, au rythme des marées, les sacs remplis de nos occupations et de petits pains fourrés.
Les plus intrépides d’entre nous combattaient les vagues fâchées. Les autres laissaient le soleil les caresser. Nos vieux nous fuyaient, à eux les longues balades. L’étendue dorée et la paix royale … à nous. En réalité.

Je me noyais dans les lectures, le bruit de l’océan qui roule et les cris des enfants-mouettes en bande sonore. Je cessais d’être pour rêver. A moins que l’inverse ce n’était. Je faisais des duels avec le soleil, le regarder droit dans les yeux et ne pas détourner. Le visage tanné. Je me laissais bercer par l’intensité de la lumière fleurtant à la surface de l’eau. Droite comme une ligne, comme un cœur qui a cessé de se laisser torturer.

𝑅𝑎𝑚𝑒𝑛𝑒𝑧-𝑚𝑜𝑖 𝑎̀ 𝑙’𝑒́𝑡𝑒́ 𝑑𝑒 𝑚𝑒𝑠 𝑝𝑎𝑟𝑒𝑛𝑡𝑠. 𝐴𝑢 𝑏𝑜𝑟𝑑 𝑑𝑒 𝑙’𝐴𝑡𝑙𝑎𝑛𝑡𝑖𝑞𝑢𝑒, 𝑛𝑜𝑢𝑠 𝑏𝑟𝑜𝑛𝑧𝑒́𝑠 𝑒𝑡 𝑛𝑜𝑠 𝑒𝑠𝑝𝑟𝑖𝑡𝑠 𝑙𝑒́𝑔𝑒𝑟𝑠.

BRÛLURES 

“𝑃𝑟𝑒𝑛𝑑𝑠 𝑚𝑎 𝑗𝑜𝑢𝑒“.
𝐽’𝑦 𝑎𝑖 𝑒𝑛𝑓𝑜𝑢𝑖 𝑙𝑒 𝑛𝑒𝑧 𝑒𝑡 𝑠𝑢𝑖𝑠 𝑑𝑒𝑠𝑐𝑒𝑛𝑑𝑢𝑒 𝑗𝑢𝑠𝑞𝑢’𝑎𝑢 𝑐𝑜𝑢
𝐼𝑙 𝑎 𝑙𝑎 𝑝𝑒𝑎𝑢 𝑐𝑜𝑢𝑙𝑒𝑢𝑟 𝑑𝑜𝑟𝑒́𝑒. 𝐿𝑎 𝑠𝑎𝑣𝑒𝑢𝑟 𝑑𝑢 𝑙𝑎𝑖𝑡 𝑠𝑢𝑐𝑟𝑒́
𝐸𝑡 𝑞𝑢𝑒𝑙𝑞𝑢𝑒𝑠 𝑔𝑟𝑎𝑖𝑛𝑠 𝑑𝑒 𝑠𝑎𝑏𝑙𝑒 𝑒́𝑔𝑎𝑟𝑒́𝑠.

“𝑅𝑒𝑠𝑝𝑖𝑟𝑒, 𝑡𝑟𝑎𝑛𝑠𝑝𝑖𝑟𝑒.
𝑅𝑖𝑠 𝑎̀ 𝑛𝑒 𝑝𝑎𝑠 𝑡’𝑒𝑛 𝑝𝑟𝑖𝑒𝑟.
𝑇𝑎 𝑚𝑒́𝑚𝑜𝑖𝑟𝑒 𝑟𝑒𝑐ℎ𝑎𝑟𝑔𝑒𝑟𝑎 𝑐𝑒𝑙𝑎 𝑞𝑢𝑎𝑛𝑑 𝑒𝑛 𝑙𝑎𝑟𝑚𝑒𝑠 𝑡𝑢 𝑠𝑒𝑟𝑎𝑠“.

J’ai brûlé ses lettres, ma peau
Et mes ailes à espérer
J’ai soufflé sur les braises de l’été
Je sais pourtant bien qu’il n’est pas fait pour durer.

ÉCLABOUSSURES 

Sur le mur
Les doutes, les ombres
Mes éclats
Blessures

CHAU(D)X

Elle m’a dit “attrape-moi la main”

Un oiseau à 5 plumes de loin

Elle m’a dit “cours aussi vite que moi”

Elle a les jambes longues commes des feuilles de palmier

Dans les rues nous avons joué

Moi petite et mon ombre

A même la chaux de mes souvenirs

D’été

De sable et d’eau

de sable et d'eau

DE SABLE ET D’EAU •

𝐿’𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑒𝑛𝑡𝑒 𝑐𝑜𝑚𝑚𝑒 𝑎𝑛𝑒𝑠𝑡ℎ𝑒́𝑠𝑖𝑒́𝑒 𝑝𝑎𝑟 𝑐𝑒𝑡 𝑒́𝑡𝑒́ 𝑞𝑢𝑖 𝑛𝑒 𝑐𝑒𝑠𝑠𝑒 𝑑𝑒 𝑠’𝑒𝑚𝑏𝑟𝑎𝑠𝑒𝑟. 𝐽’𝑎𝑖𝑚𝑒𝑟𝑎𝑖𝑠 𝑝𝑜𝑢𝑣𝑜𝑖𝑟 𝑙𝑎𝑣𝑒𝑟 𝑚𝑒𝑠 𝑝𝑒𝑛𝑠𝑒́𝑒𝑠 𝑎̀ 𝑙𝑎 𝑙𝑖𝑚𝑝𝑖𝑑𝑖𝑡𝑒́. 𝐿𝑒𝑠 𝑟𝑒𝑓𝑟𝑜𝑖𝑑𝑖𝑟. 𝑆𝑒 𝑟𝑒𝑠𝑠𝑎𝑖𝑠𝑖𝑟.

Je suis née un jour de canicule. Juin ’76.

Je suis une apprentie solaire. A toujours tenter d’équilibrer une vie gorgée d’éclats de lumière et d’ombres projetées sur la chaux. A danser sous les gouttes d’eau ou poser les pieds nus sur le sol qui brûle. Avec lui mes idées de sabotage et d’échouage. A laisser l’océan déteindre sur moi et porter l’infini de ses bleus. Dans les vagues à l’âme se jeter. Et ne jamais se laisser chavirer. Revenir à la plage de mes projets comme une bouteille lancée à la mer.

Ma destinée est placée sous le signe de la dualité. Cela fait longtemps que je le sais. Intimement que je le ressens. Sécheresse et appel du soleil, soif et fluidité, foyer et horizon, impatience et somnolence, envies et repli. Mais n’est-elle pas comme ça la vie tout court, à modeler le sable et l’eau pour construire des châteaux ? N’est-on pas ainsi fait des désirs ardents de la terre et des larmes du ciel ?

𝐿’𝑒́𝑐𝑟𝑖𝑡𝑢𝑟𝑒 𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑖𝑓𝑓𝑖𝑐𝑖𝑙𝑒 𝑠𝑜𝑢𝑠 𝑙𝑒𝑠 𝑓𝑒𝑢𝑥 𝑑𝑢 𝑚𝑜𝑖𝑠 𝑑’𝑎𝑜𝑢̂𝑡. 𝐸𝑙𝑙𝑒 𝑚𝑒 𝑓𝑎𝑖𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝑟𝑖𝑑𝑒𝑠 𝑎𝑢 𝑐𝑜𝑖𝑛 𝑑𝑒𝑠 𝑦𝑒𝑢𝑥 𝑒𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝑝𝑒𝑟𝑙𝑒𝑠 𝑠𝑢𝑟 𝑙𝑒𝑠 𝑗𝑜𝑢𝑒𝑠. 𝐽𝑒 𝑝𝑒𝑛𝑠𝑒 𝑎𝑢 𝑑𝑒́𝑏𝑢𝑡 𝑑𝑒 𝑡𝑜𝑢𝑡. 𝐸𝑡 𝑟𝑒𝑐𝑜𝑚𝑚𝑒𝑛𝑐𝑒𝑟.

A la table d’Anna

A la table d'anna

Elle n’a pas d’âge, Anna. Le film s’est arrêté au printemps de ma vie et à hauteur de ses jupons aux improbables imprimés. Filtre suranné.

Anna a les boucles immaculées. Comme des petits nuages d’ouate sur sa tête qu’elle promène tout le temps avec elle. Elle les a chopés à son mari, l’arrière grand-père. Ca ne m’étonne d’ailleurs pas d’elle. Sur son visage, un sourire et des yeux pincés qui laissent deviner l’enfant espiègle qu’elle n’a jamais quittée. Elle a trois répliques d’elle Anna. Mimi, Nénette et Suzanne, ses filles chéries. Elle a des bas collants couleur chair dont elle n’a que faire. Sur sa cheville, ils sont tout ratatinés. Les manches de ses chemisiers aussi. La fée clochette en fripes de petite vieille, ç’aurait pu être elle. C’aurait été drôlement plus magique que ce surnom tout rabougri, “La Bobonne”. Dans son sillage flotte une odeur de réglisse achetée à la sauvette chez l’épicière de la rue Piesseveaux et dissimulée dans son grand cabas de faux cuir. Noir. Diable, le caractère d’Anna. D’ailleurs, je ne suis pas sûre qu’elle allait à la messe Anna. Un point commun avec moi. Je ne dirai pas Ma foi. 

 

 

La rebelle de ma mémoire familiale, c’est elle. Peut-être parce qu’avec moi elle ne s’embarrassait pas ou peut-être parce qu’il m’importe de l’imaginer telle. Au moins je comprendrais pourquoi je suis un peu comme ça. Toujours à la frontière du non et du pourquoi. Elle aurait probablement fait un doigt d’honneur à sa fin de vie Anna. Sa manière de faire oublier les longs couloirs de la clinique, les draps qui sentent mauvais et engloutissent son corps petit à petit. Ne retenir que ses lunettes du bout du nez, ses barbichette tu me tiens et la main bien fort. Surtout.

Aujourd’hui, j’ai mis les boucles d’oreilles d’Anna. Deux mini prunelles. Et puis j’ai dressé la table. Comme elle. On ne fait pas de tralala, dans ma tête ça insistait. La joie et voilà. Un repas improvisé, que l’on prépare hâtivement en écartant de la main quelques miettes d’une table qui n’a pas encore été lavée. Deux bancs, trois chaises et le reste où bon voudra. Des assiettes de tous les jours, des bols des grands soirs et du vert primevère. De celles qui tapissent le verger d’à-côté. La fraîcheur à l’état brut. Et son rire par-dessus qui claque. Pur. A cette table, j’ai convié tous ceux que j’aime et qui comprennent. 

Anna. 

Je voudrais que pour les miens elle soit encore là.

La composition A la table d’Anna est un joyeux mélange : Esprit Cantine de Jars Céramistes,  collection Chou de Bordallo Pinheiro et lin lavé de Linge Particulier. A retrouver sur La Loja.

Florilège et lexique em português

FLORILEGE ET LEXIQUE EM PORTUGUÊS

A MALETA

Trad. : la  valise (en carton)

 

Tout a commencé avec elle.
Pour le peu que je m’en souvienne.

En tous les cas, depuis et, ce, malgré elle,
On nous nomme De Sousa, Dos Santos, Carlos, Portos, tous pareils
Mon père, Rodolfo, Josefo, Alfonso, Roberto, cousin d’Enrico (le Macias) ou de Julio (l’Iglesias) même pas nés à Porto.

On s’imagine
Que les femmes de la famille ont été créées pour frotter, chanter, soupirer et les hommes pour trueller.
Que la misère grave est tombée sur nos vieux comme la cerise dans l’aguardiente trop macérée
Et que notre héritage, semblable à ce mélodrame des années 80’, n’en finit pas.

Merci Linda !
C’est un beau “bourdel” que tu nous as mis là !

AS PORTUGUESAS 

Trad. : les filles (de là-bas)

 

Elles ont dit-on

Le sang mêlé de terre et d’embruns
La gorge déployée et le verbe fort
Le regard charbon et le nez aussi haut que leur chignon
L’or au bout des oreilles plutôt qu’en petite monnaie
La sueur collée à l’âme et le cœur sur les mains
La prière, Marie et tous les saints au bout du chapelet
Les grands-parents sous le toît
Et le reste de la casa sous le bras !

Les filles de là-bas ont ce jenesaisquoi de farouche et de malhabile. C’est qu’aux côtés des hommes elles n’ont rien à envier et pas une larme à verser.
Elles ont peut-être la pudeur de leur mère en héritage mais le caractère des vagues pour dompter leur destinée. Mes sœurs au teint halé et aux baisers salés.

Ps en aparté : si à la lecture de tout cela une portugaise tu comptes draguer, un petit conseil … le mot 𝚋𝚒𝚐𝚘𝚍𝚎 (𝚃𝚛𝚊𝚍. : 𝚖𝚘𝚞𝚜𝚝𝚊𝚌𝚑𝚎) de ton lexique tu épargneras. Je t’aurai avisé ma foi –

O TALHO 

Trad. : la boucherie

 

O talhante : 𝚕𝚎 𝚋𝚘𝚞𝚌𝚑𝚎𝚛 (𝚕𝚎 “𝚙𝚊𝚍𝚛𝚎“ / 𝚘 𝚙𝚊𝚒)

A mulher do talhante : 𝚕𝚊 𝚏𝚎𝚖𝚖𝚎 𝚍𝚞 𝚋𝚘𝚞𝚌𝚑𝚎𝚛 

A filha do talhante : 𝚕𝚊 𝚏𝚒𝚕𝚕𝚎 𝚍𝚞 𝚋𝚘𝚞𝚌𝚑𝚎𝚛 (𝚖𝚘𝚒)

A mãe da filha do talhante : 𝚕𝚊 𝚖𝚎̀𝚛𝚎 𝚍𝚎 𝚕𝚊 𝚏𝚒𝚕𝚕𝚎 𝚍𝚞 𝚋𝚘𝚞𝚌𝚑𝚎𝚛

Tal mãe tal filha : 𝚓𝚎 𝚖’𝚎́𝚐𝚊𝚛𝚎 !

Filha da (tua) mãe : 𝚓𝚞𝚛𝚘𝚗 𝚌𝚎́𝚕𝚎̀𝚋𝚛𝚎 (𝚑𝚢𝚙𝚎𝚛 𝚛𝚎́𝚙𝚊𝚗𝚍𝚞 𝚎𝚗 𝚝𝚎𝚖𝚙𝚜 𝚍𝚎 « 𝚌𝚘𝚟𝚒𝚍 𝚍𝚊 𝚝𝚞𝚊 𝚖𝚊̃𝚎 »)

VAMOS A PRAIA 

Trad. : Allez viens, on se tire à la plage

 

On va voir …

La mer : o mar
Les moules : mexilhões
Les poulpes : polvo et Polo 
Le gang des sardines : sardinhas
Les morues : bacalhau et co
Les baleines : baleias
Aldo, Pamela, Arielle la sirène,
… mon père, ma mère, mes frères et mes soeurs #hoho #ceseraitlebonheur

ps entre nous (et seulement parce que je vous vois venir) : en langage argotique du nord du pays, une morue = parva

 

DEUS

Trad. : le bon Dieu (marche aussi avec Jésus cela dit)

 

Céus : ciel ! (crottin, flûte, zut !)

Bom Domingo : jour du Seigneur

Jesus Cristo : bon Dieu de … (crotte !à

Santo Deus : doux Jésus ! (oh!)

Meu Deus ou Deus meu : oh oh ! bis

Santa Maria : Sainte Marie (please, help, ajuda !)

Santa Maria Mae de Deus : Sainte Marie mère de Dieu (exclamation ! suffocation !)

Maria Santissima : pour les demandes urgentissimes, les véritables quoi ! (socorro !)